Mission 10 – Chapitre 6
Fin de mission
Derniers cours – Dernières observations
Les cours du premier semestre se sont terminés le 2 décembre mais les professeurs ont utilisé la semaine dite de révision avant les partiels pour rattraper des cours. J’ai poursuivi les interventions et les observations.
● En 1ère année, les étudiants qui ont débuté en septembre commencent à pouvoir s’exprimer, les professeurs ont de moins en moins recours au vietnamien.
Dans la classe F6, Thanh Hoa, Préfassienne 2012, fait chanter les étudiant-e-s en fin de matinée. La Liste, est au répertoire d’une certaine Rose, dont j’ai découvert l’existence !
J’écoute et je ne comprends rien sauf métro, photo… Je le signale à Hoa qui me demande de leur faire travailler la diction. C’est parti pour le premier couplet et les suivants!
Le but est de prononcer correctement mais aussi de comprendre ce que l’on dit. Beaucoup de mots à expliquer ! Au bout d’un moment, on reconnaît les mots de la chanson française ! Ça prend du temps, mais les étudiant-e-s sont content-e-s.
Dans la classe F2 dont les étudiant-e-s ont commencé le français au lycée, je pensais pouvoir travailler sur un article intitulé « la Tyrannie de l’apparence », en prolongement de la leçon d’Alter Ego 1 qui traite du conseil vestimentaire ou des soins esthétiques. Je souhaitais dépasser le niveau de la description et de la prescription. Pourquoi faudrait-il changer de look ? Surtout que les exemples donnés sont, comme vous l’imaginez, des femmes !
Mais les étudiant-e-s ne sont pas habitué-e-s à travailler sur des textes critiques. Ils sont déconcerté-e-s et je dois en rabattre sur mes objectifs.
● En 2ème année, c’est la saison du 3C, soit les 3 semaines d’entraînement aux exercices du partiel. J’observe les cours d’Anh Tu, Phuong et Bich qui ont participé aux séminaires du mardi lors desquels nous avons élaboré les QCM sur des textes récents sélectionnés sur Internet en fonction de leur niveau de difficulté (B1) et en lien avec les thèmes traités depuis septembre.
Choisir les textes, les couper judicieusement pour qu’ils ne comptent que 250 à 300 mots, voire les récrire partiellement, les questionner avec pertinence, en variant le type de questions…cette activité nous a occupé-e-s presque deux mois pour aboutir à un résultat satisfaisant.
J’étais donc particulièrement intéressée d’évaluer les résultats des étudiant-e-s et la correction menée par les professeures. Au programme, un trafic de cornes de rhinocéros en Afrique du sud, à destination de la Chine et du Vietnam ; les dispositions de la loi Fioraso pour attirer les étudiants étrangers (notamment les cours en anglais !) ; l’ouverture d’une épicerie solidaire destinée aux étudiants à Paris.
Lors de la correction, les professeures doivent expliquer de nombreux mots mais la compréhension intuitive fonctionne. Elles doivent aussi expliquer la façon de répondre aux questions qui portent sur les liens logiques (repérer les connecteurs) ou sur l’idée générale d’un § (repérer le champ lexical).
Au terme des trois semaines, les étudiant-e-s seront satisfait-e-s d’avoir travaillé sur des textes récents et demanderont de travailler sur ce type de texte régulièrement au cours du semestre. Les professeures seront contentes de ne pas avoir à retravailler sur les mêmes textes que les années antérieures !
● En 3ème année, dans la classe F1 (très bon niveau de français) : cours de civilisation sur la presse écrite en France. J’assiste à deux exposés : trop longs pour la partie descriptive, trop courts et mal documentés pour les enjeux actuels. Après sa reprise, la professeure me demande d’intervenir. Pendant une heure, j’explique qu’il existe en France des médias publics et privés, que la presse écrite appartient à des patrons de presse, Bouygues, Lagardère, Bolloré et Cie… Je parle du pluralisme des médias papier, de la liberté « relative » des journalistes. Un monde nouveau pour les étudiants vietnamiens, et des enjeux que les deux étudiantes chargées des exposés n’avaient pas saisis.
A la suite de l’entretien qui a suivi le cours, la professeure m’a demandé si je voulais faire le cours du jeudi suivant sur les pratiques culturelles. D’accord ! J’ai parlé de « l’exception culturelle » française depuis François 1er jusqu’à François Hollande et Jack Lang, des maisons de la culture… Beaucoup d’explications à donner, illustrées par de nombreuses photos.
Derniers séminaires
● Les présidentielles et les primaires – de la droite, d’EELV, du parti socialiste
Péripéties en cascade entre les séminaires des deux derniers jeudis avec le jeté d’éponge de François Hollande, la démission de Manuel Valls remplacé par Bernard Cazeneuve, sa candidature à la primaire, celle de Vincent Peillon. Un vrai roman à suspens !
J’explique aussi les candidatures de Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron…
Compliqué dans un pays où n’existe qu’un seul parti.
● Puis vient l’heure du bilan, de remplir la fiche, d’envisager la mission 11, de parler de la mission de Pierre-Marie en février, et de se dire au revoir… de recevoir un cadeau des mains de Yen, notre dernière Préfassienne. Emotion bien sûr…
Maîtrises, thèses et manuels
● Yen, notre Préfassienne 2017, a soutenu son mémoire de maîtrise le mardi 29 novembre.
Sujet : L’expression du reproche dans quelques nouvelles contemporaines.
Elle a travaillé sous la direction du professeur Viet et manifesté de l’assurance lors de sa soutenance…qui cachait son émotion.
Après quelques questions et une courte délibération, le jury – très masculin – a validé sa maîtrise.
● Thu Ha soutenait à son tour son mémoire de maîtrise le lendemain de mon départ.
Sujet : L’étude comparative de l’acte de conseil dans la communication verbale en français et en vietnamien.
Thu Ha était dans la même classe que Tu Linh 2015 et Yen 2016, la même promotion que Huong 2017. Toutes quatre sont nées en 1991 et ont été mes étudiantes avant d’être recrutées comme professeures. Thu Ha a pris un peu d’avance sur les trois autres car elle s’est mariée en 2015 et a eu un bébé en 2016. Je ne savais pas si elle serait volontaire pour obtenir la bourse de Préfasse en 2018 mais elle m’a expliqué que ce serait une grande chance pour elle qui n’est jamais allée en France et qui pourrait faire garder son bébé pendant son absence. Elle sera donc la Préfassienne 2018.
Lors de la fête d’anniversaire de septembre de Thu Ha 91, Régine et Thu Ha 77
● Hoai Anh, Préfassienne 2012, soutiendra sa thèse le 27 décembre après des semaines et des mois difficiles puisqu’il lui a fallu gérer en même temps, les deux filles, la maison… et rédiger les 150 pages demandées. J’ai eu plusieurs séances de travail avec elle lors de cette mission puisque sa thèse porte sur l’utilisation des textes littéraires en classe de FLE.
Au Vietnam, la soutenance comprend trois étapes : une 1ère soutenance sur des articles publiés, une 2ème deux mois plus tard et une 3ème dans un délai de six mois. Le 27.12, ce sera la 2ème soutenance.
A la reprise de janvier, Hoai Anh assurera le cours de littérature en 3ème année dans les 5 classes de 3ème année, soit 5 x 2h30 par semaine, ce qui fait beaucoup. J’ai donc proposé – avec son accord – que Pierre-Marie, qui part en mission début février jusqu’à la fin du semestre, assure l’enseignement dans 2 des 5 classes. Ils pourront ainsi confronter leurs expériences et ajuster leurs pratiques.
● Phuong Lan, Préfassienne 2005, est en bonne voie et soutiendra sa thèse à l’automne 2017. L’an passé, nous avons travaillé sur L’Etranger et cette année sur La Peste, les deux romans de Camus qui constituent le corpus de sa thèse. Un après-midi par semaine, nous avons analysé le texte afin d’identifier les procédés permettant l’expression des émotions et sentiments.
● Bich et Ngoc Lan, non Préfassiennes, sont en cours de thèse et doivent soutenir à l’automne 2017 également. Mais elles rencontrent des difficultés pour leurs recherches documentaires et doivent trouver une solution pour venir en France à proximité d’une bibliothèque universitaire pour quelques mois.
● Thèses en France
Thuy dite Aquableu a été reçue docteure à Lyon courant octobre et vient de rentrer à Hanoi où elle va reprendre son poste d’enseignante. J’ai suivi son travail sur l’autonomie des étudiants vietnamiens pour lequel elle s’est appuyée sur une classe de tourisme où Tu Linh était étudiante !
J’ai eu le plaisir de sa visite le matin de mon retour.
Kim, une de nos Préfassiennes « historiques », venue en 1999, devrait soutenir en 2017 à Lyon et rentrer au Département après une longue absence. Elle y est attendue !
● Le manuel de littérature destiné aux étudiants de 3ème année m’a occupée en novembre car il fallait fusionner trois manuels que j’avais rédigés en 2008, 2013 et 2015.
Avec Binh, la dernière collègue de littérature en activité de l’équipe rencontrée en 2006, nous avons donné une orientation nouvelle au cours de littérature qui était en fait une cours d’histoire de la littérature. Nous lui avons substitué un Cours d’analyse des textes littéraires qui nécessite de maîtriser des outils linguistiques et que nous avons expérimenté depuis trois ans.
Comme cette collègue part en retraite en janvier 2017, le flambeau devra être repris par la nouvelle génération dont il faudra renforcer les compétences.
● Le manuel de civilisation a besoin d’un toilettage que nous avons commencé, sur mes suggestions, et à la demande de Dam Thuy, chef du groupe « Littérature et civilisation ». Avec Kim Hoa qui enseigne également cette discipline, nous nous sommes réparties les tâches, avec l’objectif que le manuel soit prêt en juin 2017.
Signature d’une convention entre PREFASSE et l’ULIS
Depuis 1997, nous avons fonctionné à l’amiable avec l’Université de langues. Cette année, le nouveau Recteur a souhaité que notre partenariat soit officialisé, ce qui a donné lieu à une petite cérémonie de signature lundi 5 décembre. Moment sympathique pendant lequel Préfasse a reçu de chaleureux remerciements de la part du Chef des relations internationales de l’Université pour l’aide accordée au Département de français.
Avant mon départ, les invitations sont toujours très nombreuses
Il m’arrive de devoir en décliner !
● Vendredi 25 novembre – Trân Binh, professeur de Didactique invite ses amis français de l’Aafv et de Préfasse à dîner dans un restaurant chic près de la Citadelle. Nous quittons l’université vers 18h pour prendre Nicole, Raymond à leur hôtel, proche de la cathédrale. Mais c’est Black Friday, vendredi des bonnes affaires ! Mais je peux vous dire que ce n’est pas une bonne affaire pour le trafic ! Il nous faudra plus d’une heure pour rejoindre le restaurant. Compensation, nous nous régalerons.
● Samedi 26 novembre – Je retrouve Nicole et Raymond de l’Aafv vers midi, dans un restaurant japonais, proche de l’Université, où nous sommes invités par trois Préfassiennes : Tu Linh 2015, Yen 2016 et Huong 2017. Huong va se marier dans quelques jours, Tu Linh accouchera à la mi-décembre et Yen n’a pour l’instant pas de projet matrimonial.
● Dimanche 27, je suis invitée chez Kim en compagnie de Dang Thuy. Il fait beau et assez chaud encore. Nous trouvons sans difficulté une place de stationnement à proximité de l’Opéra. Nous montons les quatre étages, Tang nous ouvre la porte et la bonne odeur de nems chatouille notre nez. Nhu est en cuisine où nous la rejoignons puis nous buvons le thé en attendant que les nems soient dorés. Je me rends compte que la température n’est pas la même pour mes amis vietnamiens que pour moi : eux en pull et moi bras nus.
Lorsque nous repartons, l’animation de la rue est toujours aussi intense : motos, voitures, vendeuses de rues, restaurant de trottoir et tout le monde est bien habillé. Il doit faire 25° !
● Vendredi 2 décembre – Une jeune femme vient me chercher à moto pour aller déjeuner chez Tinh, mère de Hai qui est à Louvain en ce moment pour sa recherche documentaire. Emotion garantie dans le trafic anarchique de Xuan Thuy. Heureusement, ce n’est pas loin et nous arrivons saines et sauves non sans que j’aie poussé quelques Oh ! Ouh la la !
Tinh était professeur au Département, nous nous connaissons depuis dix ans et avons participé à des congrès ensemble. Son mari a décidé de me vietnamiser en réduisant mon prénom à une syllabe et m’appelle Gine ! J’aime bien. Nous prenons l’apéritif puis allons déguster les crevettes et les nems à côté. La jeune femme en rose est professeur de français à l’Université de médecine de Thanh Hoa et souhaiterait que je vienne travailler avec ses étudiants l’an prochain. A voir.
● Samedi 3 décembre – L’Université invite les professeurs étrangers pour la visite d’un village ethnographique à une quarantaine de km de Hanoi suivie d’un repas à la ferme.
Nous sommes une vingtaine : Japonais, Coréens et Chinois, un Egyptien, une Russe, une Allemande de Hanovre, 5 ou 6 Etatsuniens et une Française, la Doyenne du groupe.
Départ vers 8h30. Arrivée une heure plus tard dans la région de Ba Vi. Des 54 ethnies nous ne verrons que 3 maisons.
Le village est peu fréquenté et semble inachevé. Impression qu’on me confirmera plus tard. Un grand projet qui n’a pas abouti. Le musée ethnographique de Hanoi est plus intéressant, de même que la visite des vrais villages édés, khmers ou thaïs.
Le déjeuner a lieu dans la propriété du Recteur qui nous attend à l’entrée. De nombreux invités sont déjà là : professeur-e-s des différents départements de langue et membres de l’administration. Étonnamment, les hommes sont plus nombreux que les femmes. Nous sommes installés dans la maison tandis que nos collègues vietnamiens sont dans la cour. Renseignement pris, les collègues femmes sont venues tôt pour cuisiner les plats du terroir : porc et canard, légumes. Vous remarquerez que, selon la tradition, les tables sont unisexes et que ce sont les femmes qui rangent après le festin !
● Dimanche 4 décembre, déjeuner chez les parents d’Anh Tu – Sa mère est rétablie après une hospitalisation due à la dengue. Son père a réparé ma valise qui est arrivée à Hanoi avec 3 roulettes. La 4ème est solide et a fort bien résisté au retour ! Merci de tout cœur.
● Le soir, dîner chez Lien 2011, dans son nouvel appartement du quartier de My Dinh.
Toute la famille est réunie. Après le repas nous avons droit au concert donné par la fille aînée de Lien.
● Lundi 5 décembre, déjeuner avec le groupe « Littérature et civilisation » – Excellent repas aux restaurant « 7 crabes ».
● Lundi 5 décembre, dîner chez Anh Tu – Depuis son mariage en février, elle habite avec son mari au 25ème étage d’une tour de la périphérie de Hanoi. C’est une situation encore rare que celle où des jeunes mariés habitent « chez eux ». Elle a mis les petits plats dans les grands et son mari a mis la main à la pâte !
● Mardi 6 décembre, dîner avec la famille de Hoai dans un restaurant coréen du Centre-ville. Soirée animée par les plus jeunes de la famille et les hommes qui apprécient la vodka !
Hoai est à Viet Tri où son beau-père vient de décéder très récemment.
● Mercredi 7 décembre, c’est au tour de Phuong Lan de m’inviter à déjeuner en compagnie de Bich et Canh Linh. Ce moment de détente coupe la journée consacrée tout entière aux dernières pages de La Peste. Phuong Lan a maintenant les matériaux sur lesquels elle va pouvoir construire son travail de recherche doctoral.
C’est Noël au Vietnam aussi : le sapin est installé à l’entrée du restaurant.
● Mardi 8 décembre – C’est le jour du départ et du repas d’au revoir. Visite de Thuy Aquableu et visite du Doyen avant de nous rendre au restaurant. A l’année prochaine !