Ciel rouge d’Olivier Lorelle

Sortie en salles le 23 août 2017
Durée : 1h31 mn
Film français entièrement tourné au Vietnam, dans les régions du lac Ba Be et du plateau de Dong Van, proches de la frontière chinoise.
Avant-première à L’Espace, le Centre culturel français de Hanoi, le 28 juin.
Sortie au Vietnam en octobre.

Ciel rouge - Affiche

Le synopsis

Vietnam – 1946. Philippe s’est engagé pour pacifier un pays inconnu fait de forêts denses et de montagnes spectaculaires. Ses idéaux s’effondrent lorsqu’il comprend qu’il doit torturer et tuer Thi, une jeune vietminh qui lutte pour son indépendance. Il décide de fuir avec elle dans un voyage imprévisible au cœur de la jungle. Ils deviennent amants et rejoignent un groupe de maquisards affrontant l’armée française. Livrés à eux-mêmes, ils découvriront qui ils sont. Ce film est l’histoire de leur amour.

Ciel rouge - Olivier Lorelle

Le réalisateur Olivier Lorelle

Né en 1963, Olivier Lorelle est docteur en philosophie. Il commence par écrire pour le théâtre, puis le cinéma. Ancien professeur de philosophie, il a aimé la relation avec les réalisateurs, dans un rôle « d’accoucheur ».
Scénariste, il a écrit ou co-écrit Little Sénégal, Indigènes, London river, Hors-la-loi, La Voie de l’ennemi pour Rachid Bouchareb, Omar m’a tuer pour Roschdy Zem, Home pour Ursula Meier, Gare du Nord pour Claire Simon. Il reçoit le César du meilleur scénario original, pour Indigènes en 2007.
Mais le métier de scénariste est ingrat : « On travaille des mois ou des années à l’écriture d’un texte, et à la sortie du film, c’est le réalisateur qui récolte tous les lauriers.» Olivier Lorelle passe à la réalisation qui correspond mieux à son désir initial de création. Inventer une histoire qui évolue et travailler avec une matière, dans un combat concret.
Olivier Lorelle a la fibre politique, comme scénariste déjà, comme réalisateur également. Il s’en explique : « Fondamentalement je pense que le politique commence dans l’intime. Et particulièrement, déjà dans l’amour. Faire des films a donc été tout de suite le fait de me poser cette question simple : « Est-ce que l’amour existe ? ». Dans tous mes films, je trempe, si je puis dire, l’amour dans les conditions les plus difficiles et je vois s’il y a vraiment quelque chose qui se partage, une porosité entre deux êtres. »

Le dossier de presse nous permet de répondre aux questions d’un spectateur curieux. Pourquoi ? Pourquoi ?

Ciel rouge - Indochine

Pourquoi faire un film sur la guerre d’Indochine ?

Le désir premier était de raconter une histoire d’amour impossible dans la guerre, entre un soldat et une ennemie dont le courage le fascine. Il fallait donc une guerre, entre deux ennemis de cultures différentes. Une guerre où les soldats perdent leurs repères dans un pays qui les engloutit… Or ce fut le cas pendant les débuts de la guerre d’Indochine.

Pourquoi avoir choisi l’année 1946 ?

– Pour montrer une guerre de partisans, avec des armes hétéroclites, combattus par une armée coloniale presque aussi pauvre, engloutie par la jungle… il fallait que ce soit le début de la guerre d’Indochine, avant que la Chine communiste ne vienne aider le Vietminh en 49. C’est une guerre d’astuce, très cruelle, et en même temps immergée dans la vie de tous les jours. Au début du film, pendant que Thi est torturée, les soldats jouent au ping-pong à l’extérieur. La vie continue, la nature resplendit malgré la violence et l’horreur. Fascinant !
– Pour montrer aussi le bourrage de crâne subi par les jeunes engagés français qui ont débarqué en Indochine fin 45. On leur avait dit qu’ils allaient libérer le peuple vietnamien opprimé par les Japonais mais ils ont vite déchanté et constaté qu’on les employait au service de la colonisation. Certains ont déserté, comme Albert Clavier. (Rubrique Livres)
– Enfin pour confronter l’engagement amoureux à l’engagement politique, le début de la guerre d’Indochine était idéal.

Ciel rouge - Albert Clavier

Pourquoi si peu de films sur la guerre d’Indochine ?

Dans l’histoire du cinéma français, trois films seulement ont abordé la Guerre d’Indochine, un conflit très meurtrier de huit ans, la première guerre d’indépendance et le début de la fin de l’Empire colonial français : La 317ème section (1965) et Diên Biên Phu (1992) de Pierre Schoendoerffer, Indochine (1992) de Régis Wargnier.
– La France peine à se montrer sous son côté négatif, qu’il s’agisse de la guerre d’Indochine ou de la guerre d’Algérie. Montrer un soldat français qui tire sur des Français, « ce n’est pas possible ! »
– Les producteurs considèrent que ces thématiques de repentance n’intéressent pas les Français.
– Même chose pour les films historiques qui n’intéresseraient pas le public.
Or le réalisateur voulait tourner une histoire d’amour magnifiée par l’Histoire. La guerre d’Indochine portait un idéal. Les Vietminh parlaient de faire un homme nouveau. « Le Vietnam donnera l’exemple au monde entier, disaient-ils ». Peut-on vraiment s’aimer en s’engageant pour construire un monde meilleur ? Ou bien cet idéal est-il un obstacle à l’amour ?
Il n’a donc pas été facile de financer ce film, qui a cependant pu se faire grâce au producteur Édouard Mauriat, mais avec très peu de moyens.

Ciel rouge - Edouard Mauriat

Pourquoi avoir tourné au Vietnam ?

Souvent les films censés se passer en Indochine, sont tournés au Cambodge ou en Thaïlande. Ciel rouge est le premier film français tourné au Vietnam depuis Indochine, Diên Biên Phu et l’Amant de J.J Annaud, tous trois sortis en 1992, il y a 25 ans… La 317ème section a été tournée au Cambodge.
Mathieu Ripka, producteur associé, connaissant très bien le Vietnam, a convaincu l’équipe que c’était possible. Une grande chance pour le film ! Le tournage en décors naturels, notamment pour les villages des ethnies minoritaires, donne une vérité au film et nourrit toute sa dimension contemplative. Le travail avec les Vietnamiens a permis d’être extrêmement efficaces, tant ils sont rapides, concrets, trouvant des solutions à tous les problèmes.
Nguyen Thi Chieu Xuan, la productrice vietnamienne – une actrice très connue au Vietnam – a fait régner sur le tournage une belle ambiance calme et propice.
Parmi tous les lieux visités, deux ont été retenus : le lac Ba Be, pour la forêt primaire et l’impression d’être un lieu vierge ; la région de Dong Van qui offre à la vue des chevauchements de montagnes incroyables. Deux paysages naturels contrastés correspondant aux deux parties du film : la profusion d’abord, puis l’aridité.

Ciel rouge - Profusion de la forêt primaire au lac Ba Be
Profusion de la forêt primaire au lac Ba Be
Ciel rouge - Plateau aride de Dong Van
Plateau aride de Dong Van

Comment filmer avec peu de moyens et en décors naturels ?

Le tournage a duré 19 jours, à deux caméras. Tout a été filmé en plan séquence pour aboutir à 70 heures de rushes à monter. Une méthode choisie à cause de la contrainte financière et qui finalement a satisfait le réalisateur artistiquement.

Ciel rouge - Sur le lac Ba Be
Sur le lac Ba Be

Des répétitions ont précédé avec les deux acteurs, Cyril Descours et Audrey Giacomini, dans un théâtre à Hanoi. Ensuite les acteurs ont été lâchés dans la jungle avec, à leurs trousses, les deux chefs opérateurs. Au montage, les plans séquences de parfois quinze minutes étaient une vraie matière de cinéma dans laquelle on pouvait tailler, en gardant des mouvements de caméra imprévus. Olivier Lorelle revendique une part de liberté dans l’art et d’errance dans son film. Il assume sa lenteur et son côté contemplatif, pour nous obliger à regarder ce que d’ordinaire nous ne voyons pas.
Il utilise le format Scope qui permet de faire sentir le poids du hors champ, surtout si l’on se déplace lentement. En Scope, faire des mouvements lents crée une menace. Cela fait apparaître le monde dans lequel les personnages s’inscrivent et qui n’est pas simplement un décor, mais qui a sur eux une puissance mystérieuse.

Ciel rouge -Chevauchements incroyables à Dong Van
Chevauchements incroyables à Dong Van

Le réalisateur recourt à de nombreux fondus enchaînés. Par ailleurs, la caméra est en mouvement constant, caméra portée, steadicam, à quoi s’ajoute un usage récurrent du zoom…
Il assume ses choix qui servent le lyrisme du film et tant pis s’ils sont à contre-courant d‘un certain chic minimaliste car il préfère une certaine forme de trivialité.
Le zoom était nécessaire aussi parce que dans la jungle, les chefs opérateurs ne pouvaient pas se mouvoir facilement.

Ciel rouge - Champs de cailloux à Dong Van
Champs de cailloux à Dong Van

Comment les interprètes, Cyril Descours et Audrey Giacomini, ont-ils été choisis ?

Pour leur beauté classique, quelque chose de pur dans les lignes de leur visage, pour servir le romantisme.
Pour leur aptitude à exprimer l’ingénuité et la générosité : elle, qui engage toute sa foi dans la Révolution, et lui émerveillé par la nature, admiratif du courage de cette fille viet.
Le tournage s’est déroulé dans l’ordre chronologique, ce qui a permis d’obtenir une véritable transformation des personnages à la fin du film. Il faisait très chaud, l’atmosphère de la jungle était étouffante, et avant chaque prise, les acteurs devaient faire des allers-retours dans la forêt… Plus le film avançait, plus ils étaient « nettoyés », et à la fin les personnages sont parvenus à un au-delà de ce qu’ils étaient, donc, du point de vue des acteurs, une dépossession

Les acteurs

Audrey Giacomini

Née en 1986, elle débute par du mannequinat à l’âge de quatre ans et continue à tourner dans des publicités avant de tourner des téléfilms. Ses origines vietnamiennes lui viennent de son grand-père, mi-vietnamien, mi-breton.

Ciel rouge - Les acteurs

Cyril Descours

Né en 1983, il pratique le théâtre depuis l’école primaire puis s’est inscrit au cours Florent en 1999. De 2002 à 2003, il est inscrit au conservatoire d’art dramatique du 10e arrondissement de Paris. Depuis 2005, il est membre de la Compagnie de théâtre Pas de Dieux et a poursuivi des études en maîtrise de traduction littéraire. Il est polyglotte : sa langue maternelle est l’allemand et il parle couramment le français et l’anglais et a de plus des notions d’italien et d’espagnol.
Depuis 2008, il est en couple avec l’actrice et danseuse Alessandra Martines, de 20 ans son aînée. Leur premier enfant Hugo est né le 26 octobre 2012.

Repères historiques

1858 – Début de la colonisation de l’Indochine française, fondée en 1887.
1940 – Début de l’occupation de la France par l’Allemagne.
1941 – Création du Vietminh (Ligue pour l’indépendance du Vietnam).
Mars 1945- Les Japonais attaquent les garnisons françaises en Indochine mettant fin à l’autorité coloniale de la France.
Août 1945 – Les bombes atomiques d’Hiroshima et Nagasaki scellent la défaite japonaise.
2 septembre 1945 – Profitant du vide laissé par les Japonais, Hô Chi Minh lance la résistance indépendantiste et proclame la république et l’indépendance du Vietnam.
Septembre 1945 – Le général de Gaulle juge primordial de reconstituer l’Empire français pour ne pas disparaître écrasé entre les deux blocs, américain et soviétique. Les premiers éléments français débarquent à Saïgon. Ces Français qui s’engagent dans le CEFEO (corps expéditionnaire français en Extrême- Orient) sont d’anciens résistants qui veulent continuer la grande aventure, ou d’autres trop jeunes pour avoir fait la Résistance et qui brûlent de se battre pour une grande cause. On leur présente l’expédition comme une œuvre de pacification : chasser les pillards japonais qui ont refusé la démobilisation et terrorisent la population. Mais, arrivés sur place, obligés de combattre des partisans luttant pour l’indépendance de leur pays, certains doutent et les plus résolus déserteront pour rejoindre les rangs du Vietminh. Pendant ses premières années, la guerre d’Indochine est une guerre cruelle, guerre d’escarmouches, opposant une armée colonisatrice dispersée sur le terrain à des partisans quasiment invisibles, qui frappent et disparaissent. C’est au tout début de cette période que se situe le film.

Viet-Minh et Viet-Cong

Le Viet-Minh

Front pour l’indépendance du Viêt Nam

Le Viêt Minh était une organisation politique et paramilitaire vietnamienne, créée en 1941 par le Parti communiste vietnamien. Il se présentait comme un front commun regroupant des nationalistes de toutes obédiences, et visant à lutter pour l’unité et l’indépendance du Viêt Nam, alors sous contrôle français et composé de deux protectorats (le Tonkin au nord, l’Annam au centre) et d’une colonie (la Cochinchine au sud). L’objectif est aussi de lutter contre l’invasion japonaise commencée en septembre 1940.
En pratique, la direction du Viêt Minh fut toujours nettement dominée par les communistes, dont le principal dirigeant était Hô Chi Minh. L’Armée populaire vietnamienne a été créée par Võ Nguyên Giáp en tant que branche armée du Viêt Minh.
En 1954, le pays est scindé en deux, le Vietnam du Nord dirigé par Ho Chi Minh, le Vietnam du Sud restant sous influence occidentale.

Ciel rouge - Võ Nguyên Giáp et Hô Chi Minh
Võ Nguyên Giáp et Hô Chi Minh

Le Viet-Cong

Front de Libération du Vietnam du Sud

En 1960, alors que les Américains ont pris la place des Français dans le bourbier vietnamien, un front de libération se forme qui prend le nom de Viet-Cong.
Par extension, on parle des viets-congs pour désigner les maquisards du Sud, soutenus par le par le Viet-Minh. Ils sont à l’origine d’une guérilla très efficace contre les troupes américaines. Le mouvement Viet Cong n’a plus lieu d’être à partir du retrait des troupes américaines en 1975 et la réunification du pays.

Ciel rouge - Indochine 19455-1954Ciel rouge - Indochine 19455-1954

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