Mission 10 – Chapitre 4
Culture et pédagogie en octobre
Tour du monde de la politesse
Lors des séminaires du jeudi, deux jeunes professeurs présentent les codes de bonnes manières à partir d’articles du Monde. Ces dernières semaines, nous avons fait escale en Corée du sud, en Colombie, en Allemagne et au Mexique.
L’étiquette confucianiste est toujours en vigueur en Corée : respect du père, de la hiérarchie sociale fondée sur l’âge et le sexe. Mais les mœurs occidentales ont bousculé les traditions au point que les jeunes doivent s’inscrire à des écoles d’étiquette pour savoir se comporter en société. Etonnant ! Mais boire son verre cul-sec et se saouler restent de bon ton !
En Colombie, il semble que l’amabilité a pour fonction de compenser la violence. On a la gâchette facile mais…on reste poli. On se vouvoie. Le repas n’a pas le rôle social qu’il a chez nous mais la danse, oui. La rumba est partout et un monsieur qui veut inviter une dame à danser doit en demander la permission à son cavalier. On y boit sec aussi !
Au Mexique, c’est le tutoiement qui prévaut, le vouvoiement étant vécu comme excessivement distant. On est chaleureux, on ne sait pas dire non, on se tape dans le dos, on se dit des mots tendres. Gare aux quiproquos !
Retour dans la rigoureuse Allemagne où la politesse consiste à être bref, efficace, sincère. Où les Français sont perçus comme trop polis, séducteurs, enthousiastes.
Thu Ha, la collègue qui présentait ce dernier texte a connu un franc succès en expliquant comment elle exploiterait ce texte dans son cours de secrétariat : conseils de bonne conduite au patron qui part à Berlin pour y décrocher un contrat, illustrés par une vidéo qui confirme l’article du Monde.
J’ai découvert qu’il existait des consultants en management interculturel…ce qui m’a ouvert des horizons nouveaux. Ouvrir mon entreprise de management franco-vietnamien !
Ces séances sont intéressantes tant sur le plan culturel que pédagogique. Découverte de pays mal connus des collègues, de mœurs qui leur sont étrangères, d’autres qui leur sont familières. Réflexion sur la notion de relativisme, recherche des causes expliquant ces variations nationales. Prise de parole devant les pairs. Mise au point de stratégies pédagogiques. Certaines sont plus sensibles à la structure du texte, d’autres aux champs lexicaux, d’autres ont encore beaucoup à apprendre.
QCM, Loi Travail et Johnny
● Le département de français est victime des standards anglo-saxons en matière d’évaluation qui prévalent dans un pays où tous veulent apprendre l’anglais. J’en suis donc réduite à devenir experte en QCM pour aider les professeurs dans ce travail d’élaboration, pas si facile.
Choisir d’abord un texte en rapport avec les thèmes étudiés en classe et qui corresponde au niveau ciblé. Internet offre des ressources formidables, encore faut-il ne pas choisir un texte trop facile. Certaines en sont spécialistes !
Ensuite bien maîtriser le sens du texte, sa structure, pour poser les bonnes questions, de façon correcte. Trouver quatre propositions qui ne copient pas le texte et qui ne le trahissent pas.
Après plusieurs séances en séminaires, des navettes par Internet visant à renvoyer les QCM à leur auteur après avoir signalé les fautes, une fois, deux, quelquefois trois…nous progressons très nettement. Il est temps, car ces exercices de CE (compréhension écrite) seront utilisés vers la mi-novembre lors des trois semaines d’entraînement qui précèdent les ex
amens de fin de semestre.
● Anh Tu, Préfassienne 2014, avait demandé que je leur parle de la loi Travail qui a provoqué une mobilisation forte et durable. Après la période de progrès social du Front populaire, place à la régression du gouvernement Valls.
Le texte d’appui que j’avais choisi sur le site d’Europe 1 commençait ainsi : « Contesté par les syndicats, la rue et même une partie de la gauche, le projet de loi El Khomri a été remanié à de nombreuses reprises pour tenter de trouver un consensus. Cette réécriture n’a pas pour autant permis de sortir de l’impasse puisque le gouvernement a décidé de recourir à l’article 49-3 pour faire adopter sans vote le projet de loi travail. »
Que d’explications à donner ! Pour faciliter le travail, je projette des images qui mettent des visages sur des noms, des lieux sur des mots, qui éclairent les notions de dialogue social, qui montrent l’irrévérence française.
Qui sont les syndicats représentatifs ? Je parle des élections professionnelles.
Que le gouvernement socialiste mette une partie de la gauche dans la rue, voilà qui étonne.
J’ai constaté aussi que l’image de l’Assemblée nationale ne leur était pas familière. Alors, J’explique qui est qui : le président sur son perchoir, les assesseurs, les huissiers, les tribunes du public, des député-e-s de gauche à gauche…
● En classe de 1ère année, six pages du manuel sont consacrées à des célébrités. Mais sont-elles si célèbres au Vietnam? Surtout lorsqu’il s’agit de Clotilde Courau et d’Emmanuel de Savoie, Christine Arron ou Jacques Dutronc ! Mais Johnny, l’Abbé Pierre, Bourvil, Brassens…
Bilan du sondage effectué en séminaire – après coup – portant sur le motif de célébrité et l’époque de 30 noms cités: de 5 à 17 bonnes réponses selon les fiches.
Les célébrités connues : Coluche, Cousteau, Marie Curie, De Gaulle (comme président), Deneuve, Depardieu, Hugo, Mitterrand, Molière, Pasteur, Piaf.
Je signale les quelques autres qu’il est souhaitable de connaître : l’Abbé Pierre, Brassens, Brel, Gainsbourg et Johnny.
Yen s’en est bien tirée en classe en montrant des images des trois familles d’artistes : les Gainsbourg-Birkin-Doillon / les Deneuve-Mastroïanni / les Hallyday-Vartan.
En projetant une séquence d’Indochine. Un arrêt sur image a connu le succès car on y voit un professeur encore en exercice au Département, assis à une table, smoking et nœud papillon, tandis que Catherine Deneuve danse avec une belle Indochinoise. Ce professeur m’avait effectivement raconté qu’il avait été figurant sur le film en 1992.
Et tout cela sur un ordinateur. Car la majorité des salles ne sont pas équipées. Beaucoup de travail de préparation pour le professeur mais l’intérêt des étudiants est garanti, pour Indochine ou pour Johnny.
Fête des femmes vietnamiennes et autres moments festifs
● C’est une tradition, le 20 octobre, les étudiants font des cadeaux à leurs professeures. Je constate cependant que depuis dix ans, les cadeaux sont moins nombreux et plus modestes. Mon propos n’a rien de nostalgique.
Les professeurs hommes, très minoritaires, nous ont invitées au restaurant une semaine plus tard car le Doyen était absent. La bouteille de vodka a eu vite raison de la réserve des hommes et dans une salle ultra sonore, l’atmosphère est devenue insoutenable. Selon mon voisin les femmes vietnamiennes étaient contentes. Tu plaisantes ! Elles subissent ! Je me suis échappée dès que j’ai pu. Renseignement pris, j’avais raison…elles subissent.
● Dans la famille de Lê Thuy Ha 2009 qui travaille à Paris
J’ai toujours grand plaisir à la retrouver tant elle est joyeuse et accueillante.
Huong notre future Préfassienne m’accompagnait car personne ne parle français dans la famille de Ha. Elle a beaucoup apprécié l’ambiance avec les sœurs de Bich, les n°4 et n°7, elle-même étant la n°8 sur 10. Et les beaux-frères et belles- sœurs. Et la mère de Huong 2008.
Excellent repas et propos toujours très reconnaissants de Doi, le papa, envers Préfasse qui a mis le pied à l’étrier à leur fille et aide les étudiants et les professeurs.